J’aime me balader dans les librairies.
A l’époque où j’étais en licence, j’allais souvent au Gibert
Jeune à Strasbourg Saint-Denis en rentrant chez moi. Les trois quarts du temps
je n’achetais rien, mais après une demie heure à flâner parmi les livres, les
tous neufs plein d’espoir, les vieux entrés au Panthéon et les abandonnés
en attente d'un nouveau propriétaire, je ressortais apaisée. Les librairies et les
bibliothèques ont toujours eu cet effet sur moi.
D’aussi loin que remonte ma
mémoire, j’ai toujours aimé être entourée de livres.
Mes premiers vrais souvenirs de bibliothèque remontent à
l’époque où je devais me hisser à la force des bras pour gravir les marches de
la mezzanine de la salle de jeu de ma maternelle, pour atteindre les livres
cachés dans de grands bacs blancs en bois. En 3ème je suis retournée dans cette
même maternelle pendant une semaine, pour mon stage de découverte. J’y ai
découvert que les chaises étaient à taille d’enfant, que les marches de la
mezzanine pouvaient être montées aisément par un adulte et que j’aimais
toujours m’asseoir en tailleur entre les boîtes blanches pour lire.
J’ai eu la chance d’apprendre à lire et écrire très tôt et
plutôt facilement. A partir de quatre ou cinq ans, j’ai commencé à lire seule
le soir. La table de chevet de mon lit croulait sous les J’aime Lire (ma mère
les a rangés et recomptés l’autre jour, j’en ai plus de cent-cinquante). Et
puis rapidement d’autres histoires, un peu plus compliquées, avec des mots plus
longs. A cette époque là je n’étais pas très regardante sur le contenu de ma
lecture. Un jour quand j’avais sept ou huit ans, ma mère m’a retrouvée en train
de lire un quelconque roman sur l’Egypte de Christian Jacq. Elle m’a demandé si
je comprenais et je lui ai répondu « Pas tout, mais plus je lis plus je
comprends ».
Je me racontais aussi des histoires à voix haute. J’allais
dans le garage avec un ballon de basket pour dribbler ou un cerceau à faire
tourner autour de mes mains (j’avais besoin de me tenir les mains occupées) et
je marchais de long en large en me racontant à moi-même la vie et les aventures
de mes propres personnages. Je stoppais net quand ma mère passait dans le
garage (elle me prenait sûrement pour une folle) mais ne perdais jamais le fil.
Plus je lisais de livres, plus je me racontais d’histoires,
et inversement. Les deux étaient intimement liés. Entre huit et quinze ans, je
ne me souviens pas d’un seul anniversaire ou Noël où je n’ai reçu un livre en
cadeau. Et puis, à force de me tenir les mains occupées, j’ai fini par mettre
la chose en pratique et à treize ans je suis devenue championne régionale de
basketball.
Pour mon entrée en sixième, j’ai eu un ordinateur. Un énorme
IBM avec un écran cathodique et un modem qui faisait
« kkrrrr-tuuuuu-tidutiduuu-dit-hiiiohhhuuuuh » quand j’essayais
d’aller sur Internet (en 56k avec mon forfait 3 heures). A cette époque là,
j’ai commencé à écrire. Certains de mes textes sont d’ailleurs toujours à la
maison, cachés dans des disquettes que plus personne ne peut lire.
Cette année
là, une de mes camarades de classe m’a montré le livre quelle lisait en ce
moment pendant qu’on était à nos casiers. Elle m’a dit que ça s’appelait HarryPotter et que si je voulais elle pouvait me le prêter. J’ai dévoré ceux qui
étaient sortis et ai attendu avec impatience la suite. Un jour, en passant à
Intermarché, j’ai été attirée par la couverture d’un livre de poche écrit par
Philip Pullman. J’ai fini le dernier tome de La Croisée des Mondes à 3 heures
du matin, en pleurant pour la première fois devant un livre. Une autre amie,
l’année suivante, m’a prêté L’Empire des Anges de Bernard Werber. Souvent,
l’amour qu’on porte à une chanson, un tableau ou toute œuvre artistique ou non
est lié à un contexte. L’Empire des Anges reste pour moi l’archétype du livre
qui était là au bon endroit au bon moment.
Plus le temps passait plus j’avais accès à la littérature.
J’avais parfois un peu d’argent « à moi » à dépenser après les
anniversaires ou Noël, j’avais un CDI à disposition, j’avais internet et ses
milliards de fanfictions.
Quelques découvertes marquantes sont venues jalonner les
années qui ont suivi. Hell de Lolita Pille a été un de mes premiers livres-traumatismes.
Moi qui n’avais jamais écrit que de la science-fiction ou de la fantasy, je vis
naître dans ma tête des personnages humains, sans magie ni pouvoir ni armes
laser. A dix-sept ans, j’ai écrit le premier texte de ma série Nine Lives.
De temps à autres, je me disais que je pourrais devenir
écrivain. Mes profs de français chantaient les louanges de mes écritures
d’invention et j’aimais écrire, alors ma foi pourquoi pas. Le temps passant,
j’ai cependant pris conscience du fait que je n’arriverais pas à vivre de ma
plume, pas avec mon manque de motivation et ma production poussive.
Mais je continue à écrire de temps à
autres. J’entasse toujours les idées de roman dans un coin de ma tête. Je me
dis « un jour, peut-être ».
Et je me promène dans les librairies. Je trempe dans les inventions
des autres, dans toutes ces tâches noires sur le papier, sorties directement de
l’imagination de quelqu’un qui a eu la force de volonté d'aller au bout de son
idée et de la donner en pâture aux éditeurs et aux requins-lecteurs.
Parfois, je pense aux possibilités de l’imagination. Au fait
que n’importe quel humain peut inventer réellement quelque chose, créer une
réalité, un univers, là où il n’y avait rien. Je pense à tous ces mondes si
différents ou si semblables au nôtre, à tous ces personnages qui n’ont jamais
vécu mais pour qui des lecteurs et des spectateurs vont pleurer et trembler,
qu’ils vont détester et dont ils vont tomber amoureux.
C’est un peu pour tout ça que j’aime me balader dans les
librairies.
"But really... really it was your storytelling.
That is the true power of free will, at least as you've mastered it so far. When you create stories, you become gods of tiny intricate dimensions unto themselves. So many worlds. I've read as much as it's possible for an angel to read and I haven't caught up."
Supernatural - s08e21
Donc hier je suis allée m'acheter des livres. Je ne l'avais pas fait depuis fort longtemps mais au bout d'un moment lire sur la tablette ça fatigue et puis j'aime la sensation du papier.
Et en rentrant j'ai allumé mon netbook trop lent pour aller sur internet, j'ai écrit ça, je l'ai éteint et j'ai été me coucher avec un des livres. Un est donc près de mon lit, le second est dans mon sac (pour les transports en commun) et l'autre attend sagement son tour.
Je vous laisse prendre les paris.
Dôme de Stephen King - Cloud Atlas de David Mitchell - Le Passage de Justin Cronin |
2 commentaires:
Comme je te comprends... C'est con mais à te lire j'ai l'impression de marcher dans tes pas, ou que nous suivons simplement une mémé étoile, avec quelques années d'écart.
à Caen, où je vivais, il existe une librairie d'occasion qui s'appelle "Mémoranda". on y trouve toute sorte de livres, sur tous les sujets et sous toutes les formes. Quand on y passe le pas de la porte, on sent déjà l'odeur des livres qui ont vécu et qui cherchent à renaître ici. Il y en a partout, du sol au plafond, littéralement. ça fait rêver.
Y entrer était pour moi comme plonger dans un bassin d'imagination. C'est beau, c'est pas cher (capital pour un jeune étudiant comme moi) et surtout c'est choisi. J'y passais souvent des heures à flaner, à discuter de tel ou tel livre avec les vendeuses, ou bien des clients. c'était un lieu d'échange et de rencontre qui m'a profondément marqué.
Tout ça pour te dire que je comprends ton attrait pour les librairies, que je le partage et qu'il m'inspire moi aussi. J'espère simplement que d'autres parviennent ou parviendront à le comprendre aussi mais pour ça j'ai confiance.
(et félicitation pour ton titre en basket !)
Coucou Nine,
J'ai trouvé le chemin vers ton blog et un peu de temps pour venir errer dans les parages... ;-)
Je ne connaissais jusqu'à présent que la scénariste de BD (découverte en IRL un week-end de Festiblog) et découvre donc avec curiosité ton univers de scribouille plus "solo". Verdict ? Really nice !! :)
L'histoire relatée dans ce post m'a rappelé un peu la mienne. J'avais aussi mon "garage", dans lequel je laissais libre cours à mon imaginaire. Sans ballon de basket pour moi, parce que je suis nulle en sport et/ou les ballons ne m'aiment pas. De "rat de bibliothèque", je suis devenue, au cours du temps, "rat de labo", mais les libraires demeurent néanmoins pour moi des bulles d'oxygène indispensables.
Bon, je vais peut-être arrêter de parler de moi et en revenir au topic. Hmm !
La lecture doit déjà être bien avancée, je pense, mais régale-toi bien avec ces ouvrages...
Continue d'écrire, à ton rythme, au gré de tes inspirations. Déjà pour toi, bien sûr. Et puis, c'est agréable à lire aussi pour ceux qui se trouvent de l'autre côté de l'écran. Enfin, "un jour, peut-être", lance-toi !! :-)
A une prochaine !
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